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Ceux qui nous contrôlent sur internet.


Quelques grands écosystèmes informationnels contrôlent aujourd’hui l’essentiel des interactions et des comportements connectés de la planète. Leurs noms : Google, Facebook, Apple, mais aussi Microsoft, Yahoo, Amazon et quelques autres. Ceux là mêmes qui nécessitaient, dans leur phase d’amorçage et de lancement, de se nourir d’externalités (import de nos contacts mail dans Facebook, indexation du web pour les moteurs, etc.) peuvent aujourd’hui se permettre de fonctionner quasiment en « circuit fermé ». C’est l’avènement des « jardins fermés » de Tim Berners Lee, d’un « internet des silos ».
A propos du 1er d’entre eux (Google), j’écrivais et expliquais en 2006 que sa stratégie se résumait à une formule d’inspiration pascalienne : « un écosystème dont le centre (la clé) est partout et la circonférence nulle part « .
Deux grands bouleversement sont depuis apparus : le virage du Cloud Computing, et celui des réseaux sociaux, manière d’instituer la primauté des « profils » par rapport aux « documents » dans la construction et la monétisation d’un capitalisme cognitif et linguistique pervertissant l’ensemble des logiques attentionnelles à l’oeuvre dans la navigation, la recherche, l’échange et le partage d’informations.

Les dernières annonces de Google laissent entrevoir une continuité dans cette logique de délimitation de silos sur la base d’écosystèmes dont la performativité augmentée leur permet de s’affranchir des dernières extériorités dont ils dépendent. Mais tout ça sera plus clair (enfin j’espère) avec quelques exemples

La nouvelle est étonnamment passée presque inaperçue mais elle apparaît pourtant comme capitale : Google offre désormais la possibilité de faire circuler de l’argent directement en pièce jointe à ses mails. En plus de disposer depuis quelques années de son propre moyen de paiement en ligne (Google Wallet, concurrent direct de Paypal), on peut maintenant réellement attacher de l’argent dans ses mails . La transaction s’effectue intégralement au sein de l’écosystème de Google. C’est l’aboutissement ou plutôt la « phase 2″ du capitalisme linguistique remarquablement expliqué par Frédéric Kaplan . Ce bouleversement est à mon avis l’une des raisons qui permet de comprendre pourquoi Google décide brutalement d’annoncer l’abandon de standards ouverts pour certaines partie de sa messagerie : silos dans les silos, banques et transactions financières liées s’accomodent mal d’ouverture et de transparence.

Autre annonce repérée ici et en démonstration , la mise en place « d’actions » (côté performatif donc) intégrées à la messagerie. L’idée est simple et redoutablement efficace : il s’agit de ramener l’essentiel des interactions (notamment marchandes) jusqu’ici « externes » au moteur à l’intérieur de la pièce maîtresse de son écosystème, c’est à dire Gmail (avec un lien de plus en plus fusionnel vers Google+). Donc tout ce que l’on faisait jusqu’ici, « à l’extérieur » mais « à partir d’un mail reçu » devient intégré et transparent : répondre à une invitation en l’inscrivant automatiquement dans notre agenda Google Calendar, noter ou laisser un avis sur un hôtel ou un restaurant, effectuer une réservation, mais aussi toutes les opérations d’enregistrement sur un vol aérien** (bagages, choix de la place), etc.
**Nous sommes aux Etats-Unis, et les requêtes de réservation de vol d’avion sur lignes intérieures occupent les premières places du carré magique des requêtes(« Shopping, Health, Travel, Local »)
Et comme l’argent est désormais une pièce jointe, je vous laisse imaginer la suite du/des scénario(s) ...

Clairement, la stratégie est donc de permettre d’assurer un certain nombre d’interactions liées au e-commerce directement depuis Gmail, sans « sortir » de l’écosystème Google et de sa galaxie de services. La raison de cette stratégie est très bien expliquée ici à partir du postulat selon lequel l’essentiel de la typologie actuelle des recherches concerne des requêtes transactionnelles . Or comme expliqué dans l’article de Wired , Google est loin d’être leader dans le secteur du e-commerce, loin derrière Amazon, dont une étude récente à montré une nouvelle fois la domination : « Americans were 10 times more likely to head to Amazon first versus Google to shop online. »
Et là vous me dites, « oui bé c’est normal, vu que Google n’a rien à vendre, c’est pas un supermarché culturel comme Amazon« . Et bé oui, mais non. Car pour maintenir son modèle économique (capture et monétisation de l’attention via sa régie publicitaire), Google ne peut pas se permettre de laisser échapper une énorme portion des requêtes transactionnelles au profit d’Amazon (ou d’un autre). A la manière d’Apple mais sur des bases différentes, il lui importe moins d’être vendeur que l’intermédiaire obligé et nécessaire entre l’acheteur et le vendeur, pour pouvoir établir un prélèvement sur les transactions effectuées, et définir les conditions dans lesquelles elles pourront l’être. Bref, « Google needs shopping to save search« .

Depuis que l’homme est un document comme les autres , depuis ce changement d’axe de rotation du web (qui ne tourne plus autour des « documents » – graphe des pages web – mais des « individus » – graphe des profils, cf diapo 19 ), la logique de Mc Luhan se trouve radicalement transformée. Ce n’est plus le « medium qui est le message » mais « le sujet / l’individu qui est le message. »
Rappel de la théorie de Mc Luhan :
« en réalité et en pratique, le vrai message, c’est le médium lui-même, c’est-à-dire, tout simplement, que les effets d’un médium sur l’individu ou sur la société dépendent du changement d’échelle que produit chaque nouvelle technologie, chaque prolongement de nous-mêmes, dans notre vie. 
[...] En effet, le « message » d’un médium ou d’une technologie, c’est le changement d’échelle, de rythme ou de modèles qu’il provoque dans les affaires humaines. Le chemin de fer n’a pas apporté le mouvement, le transport, la roue ni la route aux hommes, mais il a accéléré et amplifié l’échelle des fonctions humaines existantes, créé de nouvelles formes de villes et de nouveaux modes de travail et de loisir. Et cela s’est produit partout où le chemin de fer a existé, que ce soit dans un milieu tropical ou polaire, indifféremment des marchandises qu’il transportait, c’est-à-dire indifféremment du contenu du médium « chemin de fer ». L’avion, lui, en accélérant le rythme du transport, tend à dissoudre la forme « ferroviaire » de la ville, de la politique et de la société, et ce, indifféremment de l’usage qui en est fait.« 
Vous aviez un médium, nous avions des « médias ». Nous avons désormais un message. Et ce message, c’est nous. Nous sommes le message. Et Mc Luhan se retourne dans sa tombe :
« en réalité et en pratique, le vrai message, c’est le médium lui-même nous-mêmes, c’est-à-dire, tout simplement, que les effets d’un médium individu sur l’individu ou sur la société le medium ou l’écosystème informationnel au sein duquel ou grâce auquel il interagit, dépendent du changement d’échelle que produit qu’autorise chaque nouvelle technologie, chaque prolongement de nous-mêmes croisement de nouveaux ensembles de données (Datasets), dans dont le sujet est notre vie.« 
Je répète sans le texte barré :
En réalité et en pratique, le vrai message, c’est nous-mêmes, c’est-à-dire, tout simplement, que les effets d’un individu sur le medium ou l’écosystème informationnel au sein duquel ou grâce auquel il interagit, dépendent du changement d’échelle qu’autorise chaque nouvelle technologie, chaque croisement de nouveaux ensembles de données (Datasets), dont le sujet est notre vie.
C’est là une mutation profonde qui prépare autant qu’elle permet d’expliciter l’hybridation croissante – la fusion progressive diront les transhumanistes et autres adeptes de la singularité – entre l’homme et la machine, des Google Glasses aux puces RFID et autres capteurs sous-cutanés.
Hier, les acteurs majeurs de l’économie de la production étaient focalisés sur le détournement ou le pervertissement de la théorie de Mc Luhan : comment optimiser le medium pour faire passer un message différent de celui qui semblait pourtant transmis ? Leur stratégie principale de détournement sera l’industrie du divertissement.
Aujourd’hui, ce qui préoccupe les grands acteurs de l’économie de l’attention, c’est la manière dont des motifs récurrents (patterns) peuvent être extraits d’un ensemble disparate de singularités (d’indvidus), placés au coeur de l’écosystème informationnel et non à sa sortie ou à sa périphérie, pour optimiser la capacité de satisfaction immédiate que ledit système (le medium) peut apporter auxdits individus sous forme de récompense cognitive, aliénant ainsi leur attention tout en lui assignant un coût cognitif quasiment nul.
« On retrouve dans cette généalogie de la technique les problèmes évoqués précédemment, c’est-à-dire la recherche des origines pour légitimer l’émergence de nouveaux repères et critères de pertinence. Prenons par exemple la lecture industrielle, c’est-à-dire tous les moteurs ou algorithmes de recommandation et de suggestion édifiée pour nous guider vers des choix de plus en plus pertinents. Ces outils relèvent également de l’impertinence, car dans leurs suggestions, se glissent très souvent un ou deux éléments qui sortent exprès de l’expectation. En effet, les algorithmes ont été modifiés de manière à suggérer des éléments qui surprennent l’internaute, ces éléments inattendus s’avérant souvent achetés ou consultés. » Milad Douehi. Sur l’humanisme numérique.

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